L’agent immobilier, en tant qu’intermédiaire, facilite la mise en relation entre vendeurs et acquéreurs de biens immobiliers. Dans le cadre d’une prestation de services, le praticien accompagne la fixation du prix de vente. Pour ce faire, il considère les attributs du logement, les conditions du marché, son expérience personnelle, le profil du vendeur, la concurrence avec les autres intermédiaires et les outils technologiques à sa disposition.
Face à ces diverses considérations, comment l’agent immobilier procède-t-il pour déterminer le prix d’un logement ? Dans quelle mesure parvient-il à mettre en œuvre une démarche objective et rationnelle pour estimer, afficher puis finaliser un prix de vente ?
Cette recherche montre qu’en plus de l’analyse de l’interaction entre l’offre et la demande, le professionnel recourt à un ensemble de règles implicites établies individuellement ou collectivement afin de formuler un prix « satisfaisant » (H. Simon) pour l’ensemble des acteurs impliqués dans la transaction, y compris pour lui-même.
Plus précisément, l’agent immobilier écarte le bien de sa supposée « valeur intrinsèque » (E. Fama) tout au long du processus de fixation du prix. Tout d’abord, le prix estimatif est calculé à partir d’une information imparfaite et de décisions subjectives ou erronées. Ensuite, motivée par l’intensité de la concurrence, une pression à la hausse exercée sur le prix affiché se répercute dans le prix final. Enfin, pour aboutir à ce dernier, l’agent immobilier, en réponse à ses impératifs de rentabilité, incite fortement les vendeurs à baisser leurs attentes.
Par conséquent, l’étude de l’impact de l’agent immobilier sur le prix d’un logement montre que le marché ne corrige pas la subjectivité des acteurs, mais s’en alimente. Dans la lignée des résultats de J.M. Keynes ou de R. Shiller relatifs aux dimensions psychologique et sociale des marchés, ce sont les acteurs qui construisent les prix sur le marché immobilier plutôt que les prix qui coordonnent les acteurs en s’imposant à eux.
Cette recherche étudie un périmètre de 33 communes du Val-d’Oise. Elle exploite des entretiens semi-directifs, les données internes d’une agence immobilière, une revue de la presse spécialisée ainsi que des bases de prix agrégés pour explorer et quantifier des pratiques professionnelles. Le cadre théorique convoqué combine la rationalité procédurale et la théorie des conventions pour comprendre le processus de décision, tant à travers les choix individuels que les interactions sectorielles.
Ce travail aboutit à la formulation de recommandations destinées aux acteurs publics chargés d’améliorer le fonctionnement du marché immobilier.